L’origine de Castelmoron est certainement antérieure à l’époque gallo-romaine, le village appartenant à une région où l’on a retrouvé des traces des premiers groupements humains établis dans notre pays. Lorsque, au III° siècle, les légions romaines d’Adrien eurent conquis l’Aquitaine, ils occupèrent l’oppidum gaulois surplombant le Ségur, le bourg fortifié bénéficiant grâce à son tertre d’une position de surplomb lui servant de défense naturelle. Les ingénieurs romains tracèrent le chemin (que l’on appelle aujourd’hui « le pavé ») qui, par la porte du moulin à l’ouest du village, rejoint en contrebas le moulin du Ségur, permettant de relier la ville fortifiée à La Réole, à 13 kms de là.
Suite à l’invasion des Maures d’Espagne qui détruisirent le village au IX° siècle, un château fut construit au X° siècle. Une enceinte fortifiée fut vraisemblablement élevée au XII° siècle. Avec son château et ses fortifications, Castelmoron devint un castrum, un village fortifié placé sur une hauteur, au même titre que Pommiers, Gensac, Pujols et Rions dans l’Entre-deux-Mers. La sécurité de la place était assurée au nord par la porte des douves, sans doute munie d’un pont-levis, se situant au sommet actuel de la Grand’Rue, et à l’ouest par la porte du moulin, utilisée par les cavaliers et les chariots. Au nord-ouest, se situait la porte de la fontaine devant laquelle se trouvait une énorme motte artificielle. On pense qu’une deuxième enceinte fut construite au XIV° siècle (à l’époque où les Albret prirent possession du bourg), la tour ronde subsistante constituant le vestige de [cette] seconde fortification.
La seigneurie de Castelmoron fut propriété des seigneurs de Gensac dès le XI° siècle. Au XII° siècle, ce furent les Rudel, seigneurs de Bergerac, qui prirent possession du fief, la vicomté s’étendant du Drot jusqu’à Saint Ferme. Au XIV° siècle, Castelmoron fut intégré à la maison d’Albret, petite baronnie landaise qui, grâce au captage de multiples dots et héritages, acquirent la majeure partie des Landes jusqu’à l’Adour, les villes de Nérac, Casteljaloux et Meilhan dans l'Agenais, Gensac, Rions et Langoiran dans l'Entre-deux-Mers, Montcucq dans le Quercy. Suite à un siège effectué par les Anglais (pour récupérer Castelmoron des mains du roi de France que les Albret avaient perdu depuis leur alliance avec les Anglais au début de la guerre de Cent-ans), le château fut détruit au XIV° siècle. Le village survit alors dans un état misérable jusqu’au XV° siècle.
L'apogée des Albret se situe aux XV° et XVI° siècles, la maison héritant successivement de la Bigorre, du Périgord, de Limoges, de Foix, du Béarn, du royaume de Navarre, de l’Armagnac. Au XVI° siècle, François 1er marie son ami Henri d’Albret à sa sœur, Marguerite d’Angoulême. L’Albret est érigé en duché. À la mort d’Henri d’Albret, Jeanne d’Albret reprend le flambeau de la maison, et Castelmoron devient une des quatre sénéchaussées du duché, administrant une région qui va de Gironde-sur-Dropt jusqu’à Pessac-sur-Dordogne. La place de Castelmoron devenant importante comme forteresse militaire et comme siège d'une sénéchaussée, la ville est dotée d’un palais ducal. Henri de Navarre (fils de Jeanne d’Albret), très attaché au bourg dont il appelle les habitants « ses enfants », confie la garde de la cité à deux capitaines fidèles et expérimentés.
Fidèle à l'esprit de sa mère Marguerite d’Angoulême, Jeanne d’Albret favorisa l'implantation du calvinisme sur ses terres, elle-même ayant abjuré le catholicisme à Pau. Mais les affrontements violents entre huguenots et catholiques provoquèrent une radicalisation du conflit. De surcroît, le radicalisme confessionnel de Jeanne, qualifié même de fanatisme religieux, conduisit à l’irrationalité des guerres de religion. Celles-ci instaurèrent dans tout le pays un climat de guerre civile, provoquant en Entre-deux-Mers, au-delà des faits d’armes, une grande famine. Bastion calviniste, Castelmoron semble avoir accueilli trois fois Jeanne d’Albret, laquelle, lors d’un dernier séjour, inaugura un temple pour les fidèles de la religion réformée. A la fin du XVI° siècle, Castelmoron fut repris (sans heurts) par les armées du roi. Le couronnement d’Henri IV comme roi de France mit fin aux guerres des religions, et le duché d’Albret fut rattaché à la couronne de France.
Au XVII° siècle, Castelmoron devint un temps la propriété de Mazarin. Jugeant les eaux stagnantes dans les fossés nauséabondes, polluées par les immondices jetés par les habitants, attirant les batraciens et les moustiques (qui, dit-on, l’empêchaient de dormir), celui-ci ordonna de combler les fossés, le site constituant pour lui une résidence de jouissance bien plus qu’une place de défense. Au cours du XVIII° siècle, le bourg tomba en décrépitude : il n’y avait plus que 28 maisons, la plupart inhabitées et tombant en ruines. À la fin du XVII° siècle, après la révocation de l’Edit de Nantes, les dragonnades aggravèrent encore les malheurs de la contrée, les derniers huguenots de la cité devant se convertir au catholicisme ou émigrer. Au XVIII° siècle, la situation économique ne s’étant pas améliorée, une nouvelle levée d’impôts provoqua une colère paysanne qui conduisit au saccage de la sénéchaussée. Nous sommes à l’aube de la Révolution française.
Lors de la Révolution française, la sénéchaussée fut dissoute, et la ville amputée de ses terres alentour, ce qui fit du village la plus petite commune de France par la superficie. Au début du XIX° siècle, le village reçut la visite impromptue de Charles X et de son fils aîné. Au milieu du XIX° siècle, une route reliant Sauveterre à Monségur fut construite en contrebas du rocher pour contourner le bourg. Un certain engouement se développa alors pour le village, dans les milieux scientifiques et artistiques. C'est à cette époque que l’artiste archéologue Léo Drouyn étudia de près le site médiéval du bourg. Jusqu’au milieu du XX° siècle, Castelmoron disposa de commerces multiples faisant du bourg un centre très animé. Et ce n'est que depuis la seconde moitié du XX° siècle que le village a perdu son dynamisme commercial. En dépit de cette somnolence économique, le bourg, inscrit comme village médiéval à l’inventaire des sites pittoresques de Gironde depuis 1973, conserve encore aujourd'hui un attrait touristique et un charme tout particulier.
Découvrez un lieu unique où la nature, la culture et l'histoire se rencontrent. Laissez-vous envoûter par les paysages pittoresques, les vignobles vallonnés et les charmants villages de l'entre deux mers.